OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Après 4chan, Moot va-t-il tuer l’esprit du LOL avec Canv.as ? http://owni.fr/2011/05/03/apres-4chan-moot-va-t-il-tuer-lesprit-du-lol-avec-canv-as/ http://owni.fr/2011/05/03/apres-4chan-moot-va-t-il-tuer-lesprit-du-lol-avec-canv-as/#comments Tue, 03 May 2011 07:24:12 +0000 Boumbox http://owni.fr/?p=59699 Moot, pour les deux du fond, c’est Christopher Poole : le créateur de 4chan et aujourd’hui de Canv.as.

Moot a été rendu célèbre en tant que responsable de 4chan. 4chan a été rendu célèbre par sa profusion d’images en tout genre, et particulièrement par celles de son board le plus célèbre : /b.

/b a elle-même été rendue célèbre par deux choses : son armée de l’ombre Anonymous (une bande d’allumés électriques à la conscience sociale particulière) et par sa condition de générateur numéro 1 de mèmes sur les Interwebs.

Les mèmes ont été rendus célèbres par les lolcats. Parce que les mecs de /b, ils ont des chats et ils les aiment, alors ils font des blagues avec eux. Ça leur rappelle leur innocence perdue.

Christopher Poole et la tentation de la censure

Moot, depuis quelques années, est sorti de l’ombre et se balade dans les congrès Web du monde pour défendre l’un des grands principes qui fit de 4chan un succès et un moteur créatif à l’échelle mondiale : l’anonymat de ses membres. Il est d’ailleurs particulièrement délicieux de voir Moot défendre l’anonymat alors que vous aurez besoin d’un compte Facebook (le truc le moins anonyme du monde) pour valider une invitation Canv.as.

A vrai dire, ma petite théorie sur l’hypocrisie de Moot ne date pas d’hier. Elle est apparue lorsque le bon Christopher s’est mis à modérer 4chan il y a quelques mois, pour éliminer les attaques trop brutales des allumés de /b envers la plate-forme de blogs Tumblr. Le mot Tumblr lui-même y était censuré. Moot est copain avec David Karp, fondateur de Tumblr, il vit à New York et traîne dans les mêmes cercles techno-happy few que lui, d’ailleurs Canv.as a un blog Tumblr.

Moot donc, le garde fou du champ de mines qu’est 4chan, ne voit aucun souci à laisser les schtroumphs de /b ruiner la santé mentale de gamine de 13 ans ou de chrétiens tristes, mais par contre : pas touche aux hyps de Tumblr ! La seule sortie de Moot sur le terrain de la modération n’aura clairement pas brillé par sa noblesse. Le chantre du free speech, châtrant sa propre communauté pour ses objectifs de réseautage. Classe, le gars.

Bref, passons à Canv.as.

La bouffe-minute de l’Interweb ?

Canv.as n’est pas une board, c’est une machine à publier des images. Tout le monde peut facilement publier une image, puis les gens votent pour ces images grâce à une sélection de stickers (lol, étoile, coeur, serious, gross…) qu’ils apposent dessus en glisser-déposer. La page d’accueil du site met en avant les images les plus votées. Sinon tu peux aller dans l’énorme page des « nouvellement postées » pour essayer de les faire émerger. Ouais, ça marche comme Digg, le feed RSS participatif des ringardos du web.

Premier inconvénient, inhérent à cette dynamique de publi-vote : les doublons. Les trucs qui apparaissent 15.000 fois, ou ceux qui resurgissent des profondeurs, là où la fatigue mentale de la multi-répétition les croyait définitivement enterrées. Là ou /b, avec son système de 15-pages-actives-puis-l’oblivion permet de faire tourner assez vite les resucées, Canv.as de par son fonctionnement, semble nous offrir un contenu seulement très partiellement renouvelé. Un comble pour un site qui se veut générateur de mème : la bouffe-minute prête à partager du grand fast-food des Interouèbes.

Bah oui, là où /b avait une sorte de contexte, avec une organisation sous forme de forum où les discussions se créaient, Canv.as apparaît comme une forme simplifiée, happy minded et abêtie de la célèbre usine à mèmes. Moot a du bol d’avoir eu sa communauté de channeurs pour remplir les colonnes de Canv.as en début de course, mais petit à petit, l’ouverture du site fait doucement dériver la qualité du site vers la collection de jpeg débiles d’un lolimg.net.

Pourquoi ? Parce que Canv.as est un site sans contexte, sans histoire, sans réputation. Canv.as est l’instrument du lol inoffensif parce que (ok, ça va être tricky), contrairement à /b, Canv.as ne défend pas de… valeurs.

De valeurs ?

La mort de l’esprit du Lulz

Et oui, le mot peut paraître fort, mais c’est bien de ça qu’il s’agit. Les narvalos de /b, entre les blagues faussement racistes, les images de naines nues et les montages de poissons-missiles, défendent une certaine idée du Web : du troll, de la bêtise, du très mauvais goût… le lulz, quoi.

La critique et les blagues de l’actualité, le détournement et la violence morale qu’il impose parfois à la lecture. Des choses dont Canv.as n’est qu’un pâle reflet, parce que le site a une politique de modération et d’identification… Deux choses dont l’absence, selon son créateur même, ont permis à 4chan de rester un bastion de la liberté d’expression. Moot n’en est pas à une hypocrisie près, lui qui cherche une façon de monétiser son grand succès : le couvrir de pastels et de pastilles, en faire une version mois choquante.

Le risque ? Que Canv.as soit un succès. Que par son accessibilité, Canv.as s’impose comme référence et, avec sa philosophie de poney rigolard, devienne le standard moral de la moquerie et du mème sur le Web… Qu’il supplante son aîné et attire à lui la lumière du projecteur… /b a besoin de cette lumière pour conserver son niveau de créativité, quoi qu’en disent les Anonymous. Les flingués qui créent les images de 4chan veulent se voir exposer. Si les spectateurs vont ailleurs, dans un rade plus classe aux verres moins sales, les amuseurs changeront de théâtre. Tristesse et larmes de terreur.

Alors, la prochaine fois que vous voyez quelqu’un sur Canv.as, une seule chose à faire…


Billet publié initialement sur le blog Boumbox sous le titre Canv.as peut-il tuer le mème ?

Photo : FlickR CC Andrew Dupont ; London in flames ; David Singleton ; andresmh ; Shawn Carpenter.

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4Chan ou la nouvelle génération de hackers http://owni.fr/2010/06/14/4chan-ou-la-nouvelle-generation-de-hackers/ http://owni.fr/2010/06/14/4chan-ou-la-nouvelle-generation-de-hackers/#comments Mon, 14 Jun 2010 16:53:03 +0000 danah boyd (trad. Martin Untersinger) http://owni.fr/?p=18674 (Pour les newbies: si vous n’avez jamais entendu parler de 4chan, commencez par la page Wikipédia, pas par le site en lui-même. Il peut en effet heurter la sensibilité de pas mal de gens. Comme le dit un de mes amis, aimer les LOLcats et les Rickroll c’est comme aimer un bon gros hamburger. Et aller sur 4chan c’est comme visiter l’abattoir. Ça peut aider à un moment donné de le visiter, mais ça peut te transformer en végétarien)

4Chan: de l’ombre à la lumière

L’année dernière, 4Chan a surgi de l’obscurité et son importance est désormais reconnue par les grands médias. Peut-être est-ce du à l’apparition de Moot [NdT: le créateur et dirigeant de 4Chan] à la tête du classement du TIME. C’est plus probablement son discours au TED [NdT: voir notre article] qui a tout fait basculer: Moot – de son vrai nom Chris Poole – a fait apparaître un visage plus “légitime” d’un site alternatif désormais connu de gens évoluant hors de la fosse à ordure d’Internet. Ainsi, il s’est présenté comme une des animateurs de communauté les plus cohérent, prévenant et divertissant d’Internet. Bref, il est quelqu’un que les adultes peuvent comprendre, même si son site les terrifie.

Au milieu de tout ça, 4Chan a explosé. Les journalistes et les universitaires se bousculent pour étudier et analyser le phénomène. Au début, il s’agissait de savoir si cette communauté d’environ 9,5 millions de jeunes était fondamentalement mauvaise ou simplement brillante. L’obsession s’est concentrée sur l’anonymat, le discours de Chris au TED ayant déplacé le débat. Ces deux discussions constituent sans nul doute d’intéressants sujets. 4Chan a créé la plupart des mèmes les plus adorables d’Internet, mais certains de ses utilisateurs font partie des fauteurs de trouble et des trolls les plus néfastes du web. Et l’anonymat est un sujet complexe qui ne peut pas être réduit à une question de responsabilité ou à celle de savoir si le commentateur anonyme est brillant ou malfaisant. Je pourrais écrire un long papier sur la manière dont l’anonymat recherché sur Internet compense le fait que les moyens d’y être identifiables sont plus importants que tout ce qui a jamais existé hors-ligne, mais ce n’est pas le but de ce billet. Au lieu de ça, ce que je veux montrer c’est que 4Chan est la nouvelle génération de la culture hacker. Et que c’est en tant que tel qu’il devrait être apprécié ou vilipendé.

4Chan, paradis des nouveaux hackers

J’ai grandi dans une communauté de hackers, au moment où l’âge d’or du hacking touchait à sa fin. Beaucoup de mes amis au lycée se vantaient de leur talent en piratage téléphonique ou de leur capacité à s’introduire dans des systèmes extrêmement sécurisés. Alors que certains étaient de vrais génies, peu étaient réellement malveillants et intéressés par la destruction de ces systèmes. La plupart de mes amis voulaient simplement voir de quoi ils étaient capables. Pour eux, hacker était quelque chose de terre-à-terre, exploitant la stupidité de ceux qui utilisaient “admin/admin” comme identifiant et mot de passe en laissant des petits mots d’amours et des poissons d’avril. Bien sûr, cela avait des conséquences. Un de mes amis a été banni du réseau Internet du lycée alors qu’un autre s’est retrouvé à croupir dans les système de sécurité de la marine. Je n’étais pas reliée à l’élite des hackeurs, ceux qui étaient centraux pendant l’âge d’or du hacking, mais j’ai grandi à la marge, de manière à pouvoir apprécier leur prouesses techniques (et à vouloir être Angelina Jolie quelques années plus tard).

Selon votre positionnement, les hackers sont vilipendés ou adorés, considérés comme des destructeurs ou comme des gens qui ont contribués à améliorer les systèmes de sécurité pour les rendre beaucoup plus sûrs. En tant que communauté, ils étaient considérés comme alternatifs et underground dans les années 80 et 90. Pourtant, les anciens hackers font maintenant partie des gens les plus puissants dans l’industrie. Certains hackers étaient réellement mal intentionnés, alors que d’autres s’étaient lancés dans des actions qui peuvent être comprises par la célèbre phrase de 4Chan : “pour le lulz“. Ils étaient capables de choses incroyables. Et pendant que la plupart de ceux qui faisait ça “pour le lulz” n’avait aucune intention politique, leur impact a fini par être profondément politique, façonnant le développement des systèmes technologiques.

Les hackers de l’attention et les flux manipulables

Je dirais que 4chan est le point zéro [ground zero] d’une nouvelle génération de hackers, ceux veulent à tout prix hacker l’économie de l’attention. Alors que les hackers traditionnels s’en prenaient à l’économie de la sécurité, c’est-à-dire au centre du pouvoir et de l’autorité avant Internet, ces hackers de l’attention montrent à quel point les flux d’information sont manipulables. Ils montrent qu’on peut jouer avec les classements et que les contenus de divertissement peuvent atteindre une popularité de masse sans avoir la moindre attention commerciale (sans tenir compte de savoir si quelqu’un a décidé de le commercialiser de l’autre côté). Leurs singeries poussent les gens à réfléchir au statut et au pouvoir et ils encouragent les gens à rire de tout ce qui se prend trop au sérieux. L’approche m’est familière et cela ne me surprend pas d’apprendre que les vieux hackers ressentent un sentiment chaleureux en pensant à 4chan, même si les trolls et les fauteurs de trouble les ennuient énormément.

Dans un environnement médiatisé où les marketeurs ont pris les pouvoir, il y a quelque chose de délicieusement subversif de parier sur la sub-culture anarchisante. Parce qu’au final, beaucoup de hackers old school n’étaient pas vraiment réjouis de réaliser que la démocratisation de la culture web signifiait que la culture mainstream allait dominer la culture web. Pour nous les geeks, les freaks et autres queers qui voyaient le net comme un sauveur, la démocratisation signifiait une perte de pouvoir.

J’espère qu’il y en aura toujours pour nous rappeler de ne pas prendre Internet trop au sérieux

Comme les hackers traditionnels, les hackers de l’attention qui émergent aujourd’hui ont de multiples facettes. Il est facile d’apprécier l’esprit qui les anime et de dénigrer certains individus ou actes individuels. En reconnaissant le pouvoir culturel de la communauté représentée par 4chan, je ne veux pas justifier certains actes détestables. Mais je veux rire de la stupidité de certains et trouver de l’humour dans leurs bouffoneries, tout en refusant certains actes. Je veux me plaindre du fait que cela fait 20 ans que la culture des hackers est encore principalement mâle et blanche, tout en étant stimulée par l’émergence d’une nouvelle subculture alternative. Bien sûr, il semble que ça ne va pas rester alternatif longtemps. Et je ne peux pas dire que je suis très heureuse que les parents et les ados moyens connaissent 4chan (c’est précisément pourquoi je n’avais pas écrit à ce propos plus tôt). Mais je pense que c’est quelque chose d’important pour ceux qui ont investi dans le hacking de l’économie de l’attention. Et j’espère qu’il y en aura toujours certains pour nous rappeler de ne pas prendre Internet trop au sérieux.

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Billet originellement publié sur le blog de danah boyd, sous le titre “‘for the lulz’: how 4chan is hacking the attention economy“.

Traduction: Martin U.

A visiter aussi, notre billet sur le discours donné par Moot, le fondateur de 4Chan, au TED.

Crédit Photo CC Flickr: Therkd.

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4chan, retour sur un mythe d’Internet http://owni.fr/2010/06/03/4chan-retour-sur-un-mythe-dinternet/ http://owni.fr/2010/06/03/4chan-retour-sur-un-mythe-dinternet/#comments Thu, 03 Jun 2010 10:35:17 +0000 Martin Untersinger http://owni.fr/?p=17412 Cliquer ici pour voir la vidéo.

Qui est donc ce petit nerd maigrichon, presque trop petit pour la scène du TED ?

C’est Christopher Poole, aka “Moot”, fondateur du forum américain 4Chan. Il a longtemps été discret, n’accordant les interviews qu’au compte goutte (lire celle du NYTimes de mars dernier). Et pourtant: il est probablement un de ceux qui ont le plus compté sur Internet ces dernières années.

Il faut dire que le site qu’il a fondé en 2003 est une sorte de mythe. Un forum gigantesque, alimenté en permanence par des millions d’utilisateurs, le plus souvent anonymes, devenu en quelques années un des plus importants pourvoyeurs de LOL et de mèmes, s’affirmant comme un des avatars les plus prolifiques de ce que beaucoup appellent la culture internet.

Sept ans après sa création, avec plus de 8 millions de visiteurs et 600 millions de pages vues par mois, 4chan est devenu un mastodonte, un des plus grands sites internet du monde, avec une puissance de frappe qui force le respect. Christopher Poole revient ainsi pendant sur son discours sur les quelques faits de gloire du forum : la création des LOLcats, du rickroll ou de Pedobear, devenus des items culturels emblématiques du net.

Mais l’influence de cette bande de geeks s’étend plus loin. Lorsque le magazine Times fait appel au vote des internautes pour désigner la personne la plus influente de l’année 2008, les utilisateurs de 4Chan s’emparent de la question et submergent le site de votes en faveur de Moot… jusqu’à parvenir à lui faire remporter la compétition (devant Barack Obama, le Dalai Lama ou Vladimir Poutine…) ! Plus fort encore : les utilisateurs du forum ont voté de manière à ce que lus de hauts en bas, les premières lettres des noms figurant dans le classement forment le mot “Marble cake is also the game” !

“Moot” le rappelle dans son discours, 4chan s’est aussi fait un des hérauts de la lutte contre l’église de Scientologie, et a également réussi à démasquer, depuis une vidéo Youtube et en utilisant les réseaux sociaux, un internaute qui avait posté une vidéo de lui en train de maltraiter son chat.

Ce discours sur les apports et le mode de fonctionnement de 4chan pose évidemment la question de la vie privée sur Internet. En effet, sur le site, l’anonymat règne en maître et c’est probablement ce qui permet à ses utilisateurs de contribuer avec autant d’intensité (et souvent, il faut le dire, de vacuité) à l’activité du site. Normal que les récentes évolutions du web, vers un partage toujours plus large de nos données personnelles, aient tendance à désoler Poole: “4chan est un endroit ouvert, où les conversations ne sont pas filtrées. Actuellement, nous nous dirigeons vers plus de réseaux sociaux, où on dévoile son identité, où il y a moins de vie privée. Je pense que l’on perd quelque chose de précieux“.

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Crédit Photo CC Flickr : Redmaxwell.

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